
Feu
Les êtres visés par le feu ou la lumière présentent des similitudes avec cet élément. Si l’on dit du feu qu’il est chaud, ardent et lumineux, on applique ces attributs de base à la personne qui en est marquée. Ainsi, on peut suggérer qu’elle est fougueuse, animée, flamboyante, vive, impétueuse, prompte, primesautière; qu’elle peut générer des idées brillantes, lumineuses, éclatantes, incendiaires ; que le comportement pourrait bien être enflammé, impulsif, fringant, débridé, tout d’une pièce, exalté, explosif et bien sûr animé par le feu de la passion.
Elle n’accepte pas facilement la lacune, la défaite, l’épuisement, le recul. Elle possède cependant la possibilité d’un rebond dynamique, la faculté de produire un sursaut inattendu pouvant finalement surprendre et vaincre l’adversaire. Elle conserve en réserve une petite étincelle d’énergie suffisante pour rallumer une attisée, pour fournir au dernier moment encore un ultime effort. Mais elle est appelée aussi à souffrir de ce qu’on pourrait qualifier de complexe de Phaéton. Non pas complexe dans le sens de pathologie ou de déviance, mais dans le sens d’un « ADN psychique », d’une configuration psychologique.
Phaéton était en mythologie le fils du Soleil. Ayant senti plaisir, fierté et tendresse à la visite que lui avait rendue son fils pour être enfin reconnu par son père et par tous comme ce véritable fils, le Soleil lui fait la promesse de lui accorder ce qu’il lui demanderait. Phaéton manifeste le désir de conduire pendant un jour le char de son père, croyant pouvoir accomplir la même tâche grandiose et colossale que celui-ci. Malgré les nombreuses tentatives de son père pour l’en dissuader, celui-ci n’y parvint pas. Il est alors dans l’obligation de remplir sa promesse. Phaéton s’installe donc derrière le char majestueux et flamboyant, mais ne parvient pas à contrôler l’attelage céleste, incendie plusieurs régions terrestres et finit par être précipité dans la mer, où il s’éteignit. C’est en utilisant son nom que la science a appelé photon la particule identifiée dans la lumière. Et un photon est identique à tous les photons du Soleil. Phaéton s’est imaginé soleil entier et donc capable d’accomplir ce que faisait celui-là même qui était pourtant à son image et à sa ressemblance. Lumière lui-même, mais étincelle seulement, il a été grandement ébloui et suffisamment aveuglé pour déclencher une catastrophe reliée à la tâche démesurée qu’il croyait pouvoir mener à bien afin d’être réhabilité.
Le représentant des signes de feu sait trop bien qu’un corps faible ou anémique restreint ainsi les ambitions de l’esprit, alors qu’un corps fort et robuste obéit plutôt à la puissance de sa volonté. Et dans les cas extrêmes, il peut aller jusqu’à refuser de reconnaître la maladie, de reconnaître qu’il est diminué ou soumis. L’action audacieuse, périlleuse et glorieuse allume sa témérité qui devient alors le plus grand ennemi à combattre. Le feu l’éblouit et il n’arrive plus à se voir tel qu’il est, mais bien plutôt tel qu’il voudrait être, triomphant de tout y compris de lui-même.


Le feu du Bélier est le feu de paille, l’étincelle première, le mince, mais vif faisceau laser. Il est le feu par lequel tout commence. Si la Balance située à mi-chemin entre le début et la fin de la roue zodiacale représente l’équilibre, le Bélier en est le point de départ et incarne une sorte de « big bang » donnant le coup d’envoi de ce long cycle dans lequel il est reconnu douze phases. Le natif du Bélier est facilement excitable, souvent tendu comme un ressort, spontanément prêt à l’action à tout moment. On peut dire qu’il n’y a pratiquement pas de distance entre la pensée et l’action tellement il goûte à l’avance le plaisir de passer à l’acte dans les plus brefs délais. Cette jonction étroite entre la pensée et l’acte est ressentie comme le contact entre les pôles positif et négatif d’une charge qui permet l’allumage et le démarrage. On verra donc souvent le Bélier ébaucher un projet, enclencher une manœuvre, se lancer dans une aventure, défendre un programme, entreprendre des travaux, proposer une tâche, inaugurer une nouvelle collaboration, plonger dans une activité inédite, se donner des résolutions… mais on le verra peut-être aussi manquer de feu sacré pour se rendre jusqu’à la fin. Il pourrait de la sorte s’en tenir à l’ébauche, au schéma, au croquis. Il faut bien comprendre qu’il est tellement plus à l’aise dans la lancée et donc au début plutôt qu’à la fin. Et même quand ça fonctionne, c’est souvent les autres qui vont terminer le travail parce qu’il n’excelle pas dans la finition, ou qui vont recueillir les bénéfices parce qu’il est déjà lancé sur une autre affaire qu’il vient de flairer. Mais l’histoire retiendra que c’est lui à l’origine qui a provoqué, brusqué, déclenché le changement, généré une nouvelle façon de penser ou qui a procédé à une tout autre manière de faire.


Le feu du Lion est le feu dont est détenteur celui qui gouverne la multitude, éclaire la route, pilote le vaisseau et entraîne les autres dans son sillage, ses projets, ses ambitions. Il inspire confiance, respire assurance et loyauté. Le prestige d’un tel chef n’a nul besoin d’un sceptre de fer pour régenter les foules afin de les soumettre. Elles se regroupent d’elles-mêmes autour de cette autorité et se laissent conduire par elle. Les individus ainsi agglomérés se donnent alors une force par leur seul rassemblement et qui dure aussi longtemps que le feu de ce phare resplendissant peut exercer sur cette masse sa fascination, son attraction. Les sujets font un avec ce commandeur pour aller de l’avant. Si l’action sociale n’est pas le lieu de l’expression, c’est alors l’égo lui-même qui est le vaisseau à piloter, l’adversaire avec lequel il faut lutter, la force brute qu’il faut discipliner. Nous aurons alors l’artiste accompli, le créateur unique, le concepteur de style, le maître d’œuvre, l’orfèvre, le champion d’une discipline, le virtuose de son instrument. Ces personnes sont élégance dans la ville, distinction dans les idées, dignité dans les actions. Elles sont aussi incendie ou feu d’artifice, tous deux spectaculaires. Il y a bien un peu de regardez-moi, de m’as-tu-vu, de narcissisme, de vanité dans ce volet flamboyant. Comme le soleil qui règne au centre de son système, le Lion estime occuper la place qui lui revient: c’est ainsi qu’il a tendance à ramener les autres au rang de planètes jouant le rôle de faire-valoir. Mais ce peut encore être le bon feu de foyer chaleureux ou le feu de camp fascinant. Il incarne alors la cordialité bon-enfant, l’enthousiasme enjoué de celui qui veut faire la fête avec tous. Ce maître de cérémonie sait charmer amis et invités. Il sera bien sûr encore le centre attractif, mais dans ce cas-ci, plus précisément le cœur de la célébration et des réjouissances.


Le feu du Sagittaire est le feu encore présent sous les apparences grises de la cendre, mais qui ne crépite ni ne flamboie : c’est la braise. Un feu sans éclat ni panache parvenant malgré tout à réchauffer et même encore longtemps. Sans effort les flammes se rallumeront dès que le feu sera nourri. C’est le flambeau, le feu qui guide dans la nuit ou la lucidité qui s’oppose à l’obscurantisme. C’est le maître qui transmet ses connaissances à un disciple ou à une génération s’il juge les conditions propices. La passation se fait parfois dans l’anonymat afin d’éviter que le maître soit menacé et pourchassé pour avoir répandu des idées que ne partagent pas les autorités. Idéal périlleux pour lequel il n’hésitera pas à fourbir les armes, estimant sa révolte honorable, respectable, n’ayant rien à voir avec les caprices d’une délinquance non assouvie. Le feu est aussi utilisé pour détruire les connaissances des civilisations qui portent ombrage au vainqueur. Mais le sage Sagittaire reconnaît qu’elles restent pourtant toujours dépositaires d’érudition, d’expérience et de lumière. Ces personnes sont souvent à leur manière des conservateurs de ressources, des gardiens, des défenseurs, des protecteurs, des parrains qui ont en commun de vouloir éviter à d’autres d’avoir à réinventer la roue ou à redécouvrir les vertus d’une plante, d’une loi, d’un principe philosophique universel. Un feu qui couve sous la cendre dissimule toujours un puissant potentiel réactif. Aussi, à la moindre alerte menaçant son indépendance, la mèche s’allume et son esprit s’échauffe: il se cabre, rue, se rebelle, s’élève pour exprimer haut et fort son désaccord, contre-attaque, refuse d’être enfermé dans les habitudes, les idées reçues, d’être confiné à l’enclos. S’il accomplit certaines tâches comme s’il s’agissait d’une mission, c’est qu’il vise haut et loin. Que sa sagesse soit savante ou empirique, elle touche de près le petit comme le grand, car elle contient toujours plus d’humanité que de rationalité disjointe de la sensualité. Aspiration à l’élévation et adhésion à une foi ardente dans l’homme. Quelle qu’en soit l’issue, courageux est le combat qu’il mène contre le feu de ses pulsions animales qui subjuguent et désarçonnent.